Qu’il me tient au coeur ce joli "Val des Roses".
Pays où tu naquis sous les brumes du Nord.
Ses parfums capiteux se mèlaient en accord
Aux salines senteurs par les sables moroses
Que le vent blesse et mord.
Des roses à foison, des fleurs épanouies
Naissant au vent glacial de la mer accouru
Emaillaient les jardins d’un décor imprévu
Sous un ciel de grisaille où se fondaient les pluies.
Bien maussade et bourru.
Rouges tuiles aux toits sur un fond de turquoise.
Naines blanches maisons aux coquets volets verts.
Portillons accueillants et battants grands ouverts
Se jouaient des éclats de frondaisons soumoises
Sous d’aimables couverts.
Adossés au pignon. en espaliers. la vigne
Et le rosier grimpant étalaient leur rameau.
Des bouquets d’aubépine encadraient le tableau
Qu’un soleil radieux marquait de son insigne
En jouant sur l’ormeau.
Tu prisais à loisir la floraison magique
Qui. s’incrustant partout jaillissait du sablon
Et ces fleurs au jardin. ces roses au balcon
Te présentaient leur coeur d’un air énigmatique.
Celui de ton Vallon.
Gratienne Denière-Soyez
(Aux hasards du destin)
En 1944, fuyant Dunkerque, la jeune Sophie-Marcelle Poirier débarque en Avignon.
A la Libération, « dans un de ces petits bals de plein air, un soir, sous les flonflons de la place des Carmes, Marcelle croise un de ces charmeurs que l’on suit tranquillement et qui vous mènent devant monsieur le curé… » Pour l’état civil il est Roger Joseph Mathieu.
Un drôle d’univers sucré que Marcelle, la « chti », découvre et donnera à goûter à ses enfants ; toutes ces fleurs de Provence dont elle deviendrait la sève nourricière.
A commencer par le premier d’entre eux, une fille, Mireille la bien-nommée en ce pays-ci. Marcelle et Roger dûment épousaillés, accordons à présent à l’enfant le droit de paraître.
Délaissée par sa génitrice dès après sa naissance dans un petit bourg du Nord – Rosendael (« La Vallée des roses ») -, elle fut élevée à Dunkerque par sa grand-mère.
A cette misère morale vint bientôt s’ajouter la symphonie délétère des canons et des bombes.
En une nuit, en mai 1940, la vieille femme et l’enfant perdirent leur petite maison, ce refuge affectif qui avait redonné à Marcelle un sens à son existence. Pour la grand-mère, âgée de quatre-vingt-douze ans, ce fut l’hospice, puis la mort, quatre mois plus tard. Sans ressources, sinistrée et à nouveau orpheline, Marcelle tenta de retrouver sa mère en retournant dans le café où celle-ci était censée oeuvrer en qualité de serveuse. Volatilisée, cette chère maman.
La suite, nous la connaissons : Marcelle débarque à Avignon en 1944, dégote un premier emploi à la mairie où on lui confie le soin d’établir les cartes de tickets de pain, fait la connaissance de Roger, découvre émerveillée l’atelier de son beau-père, près du cimetière de la ville et, éprise autant que rassurée, se laisse épouser, puis devient mère pour la première fois.
Source : E. Bonini « La véritable MM » (Editions Pygmalion)